Officier de la Légion d'honneur
Prononciation :
Pierre Jacotin voit le jour à Champigny-les-Langres, en Champagne, le 11 avril 1765. Si son père, Etienne Jacotin, est un simple cultivateur, son oncle maternel, Dominique Testevuide, dirige, après 1770, l'établissement du cadastre de la Corse (connu sous le nom de Plan Terrier de la Corse). C'est lui qui va pousser son neveu vers une carrière de géomètre.
Après des études de mathématiques, le jeune homme suit son oncle sur l'Île de Beauté et y travaille de 1781 à 1794 sous sa direction. D'abord élève-géomètre, il gravit peu à peu les échelons et passe ingénieur-géographe puis chef vérificateur. La Corse étant tombée provisoirement sous la domination anglaise, les autorités françaises sont contraintes de fournir à l'envahisseur le plan cadastral qui vient d'être achevé, non sans obtenir le droit d'en conserver une copie. Malgré la mauvaise volonté de l'amiral Samuel Hood, le chef des forces anglaises, Jacotin mène à bien son travail de copie et quitte la Corse en mars 1796 muni du résultat de ses efforts.
En 1798, toujours sous l'autorité de son oncle, Pierre Jacotin fait partie de l'équipe de géographes affectés à l'expédition d'Egypte pour établir la carte du pays. Il exécute personnellement de nombreux relevés, d'Alexandrie, du Caire et de l'expédition de Syrie, durant laquelle, au cours de la première moitié de l'année 1799, il parcourt à pied la route entre Le Caire et Saint-Jean d'Acre, relevant au pas et à la boussole les marches et les camps de l'armée
. Au retour de Syrie, le 28 juin 1799, Bonaparte désigne Jacotin comme chef des ingénieurs-géographes de l'armée d'Orient en remplacement de l'oncle Testevuide, assassiné huit mois plus tôt lors de la grande révolte du Caire. Cette nomination donne à Jacotin le rang de colonel.
Regardé comme le principal auteur de la carte de l'Egypte, Jacotin est membre de la commission des Sciences et des Arts dès sa création. Il entre ensuite successivement à l'Institut d'Egypte (20 janvier 1800) puis au conseil privé de l'Egypte (14 septembre 1800), tout en continuant à travailler à sa carte, assisté d'un autre ingénieur-géographe, Jean-Baptiste Coraboeuf, et de deux polytechniciens, Edme-François Jomard et Bienheureux Lecesne. Seul son mariage avec Marie Naydorff, le 7 juillet 1801, interrompt un moment ses travaux.
Après la capitulation du général Jacques-François de Menou, et instruit par son expérience corse, Jacotin parvient cette fois à soustraire le résultat des travaux des ingénieurs et des géographes aux Anglais vainqueurs qui rêvent de s'en emparer. Ce n'est qu'à force de soins et de prudence que le travail des ingénieurs géographes a été sauvé des mains des Anglais
écrira-t-il plus tard.
De retour en France en décembre 1801, Jacotin est nommé chef de la section topographique du Dépôt de la guerre le 16 janvier 1802, fonction qu'il conservera jusqu'à sa mort. On lui confie également un poste de professeur à l'Ecole spéciale militaire de Fontainebleau (10 mars 1803).
Continuant son grand oeuvre, Pierre Jacotin s'applique à la réalisation de ses deux cartes d'Egypte et de Syrie. La première, topographique, exécutée au 1/100 000ème, comprend 47 feuillets pour une surface totale de 11 mètres carrés. La seconde, géographique, au 1/1000 000ème, n'a que 3 feuillets et un peu moins d'un mètre carré. Leur gravure a lieu en juin 1804 mais Napoléon les place sous le couvert du secret militaire et leur publication est interdite jusqu'à la Restauration.
L'expérience acquise dans la confection de ces cartes fait l'objet d'un article : Mémoire sur la construction de la carte de l'Egypte, que rédige Jacotin et qui trouve sa place dans la Description de l'Egypte. Elle sert également aux ingénieurs de sa section dans leur travail quotidien d'élaboration des cartes de l'Empire (et des diverses contrées traversées au gré des campagnes militaires), aussi bien à ceux qui travaillent en cabinet à Paris qu'à ceux qui arpentent le terrain. Le résultat en est une diminution considérable (de 60 à 80 pour cent) des délais de réalisation.
En 1821, Jacotin participe à la fondation de la Société de Géographie. Il dirige ensuite le relevé en un temps record (moins d'un an) d'une carte de l'Espagne qui servira en 1823 lors de l'intervention française. Il revient sur le terrain de ses débuts en 1824 pour dresser une nouvelle carte de la Corse puis entreprend la célèbre carte d'Etat-major de la France, au 1/80 000ème, qu'il n'aura pas le temps de mener à son terme.
Il meurt le 4 avril 1827, à Paris, au 4 rue du Four-Saint-Germain, d'une gangrène de la jambe, malgré les soins prodigués par les docteurs Larrey et Dubois, deux anciens d'Egypte. Il est enterré le lendemain au cimetière du Père Lachaise, 39ème division , dans le carré des généraux.
Pierre Jacotin. Gravure anonyme.
Jacotin reçut la croix de Chevalier de la Légion d'honneur le 17 juin 1809. Il fut promu Officier le 25 avril 1821. Il était en outre Chevalier de Saint-Louis depuis le 13 août 1814.
Sa tombe est ornée d'un obélisque, en souvenir de l'importance de son travail en Egypte.