Le fils ainé de la Révolution
Certains veulent, de nos jours encore, voir en Napoléon le fossoyeur plutôt que l'héritier de la Révolution. Ils lui reprochent d'avoir remis en place une monarchie héréditaire, ne différant finalement de celle qui avait précédée 1792 que par la famille régnante.
Les partisans de l'Ancien Régime, eux, ne s'y trompent pas longtemps. Leur cécité politique les fait bien un moment rêver que l'ancien protégé d'Augustin Robespierre devienne un nouveau George Monck (l'ancien bras droit d'Olivier Cromwell, qui avait aidé après la mort de ce dernier au rétablissement de la royauté en Angleterre) ; leur certitude de représenter le seul gouvernement légitime les amène bien à imaginer, dès qu'ils n'ont plus face à eux des régicides, que celui qui s'était pourtant victorieusement opposé par deux fois à leurs tentatives de conquête du pouvoir – qu'elles aient été violentes, comme le 13 vendémiaire, ou légales, comme le 18 fructidor – va le leur remettre après le 18 brumaire ; la réponse est rapide, ferme, et sans appel.
A cette courte et illusoire trêve près, Napoléon Bonaparte trouve toujours en face de lui ceux contre qui la Révolution s'est faite. Ils sont, durant toute sa carrière, ses ennemis les plus décidés.
Ses premiers succès, Toulon, le 13 Vendémiaire, Bonaparte les obtient sur des insurrections royalistes. Plus tard, jeune chef d'État, il doit faire face aux ultimes feux des révoltes de l'Ouest avant de devenir la cible privilégiée des derniers chefs chouans réduits au rôle de conspirateurs et d'assassins.
Son prestige et sa puissance, de 1804 à 1812, étouffent ensuite pendant près de dix ans presque toute velléité d'agitation royaliste mais les revers, après 1813, libèrent les vieilles haines, aussi ardentes que jamais.
La Terreur blanche alors répond à la Terreur républicaine, comme pour encadrer d'un sanglant liseré le tableau flamboyant de la France Napoléonienne ...