Date et lieu
- 27 et 28 novembre 1812 près de la rivière Bérézina, affluent du Dniepr (actuellement en Biélorussie).
Forces en présence
- Grande Armée (49 000 combattants et 40 000 retardataires) sous le commandement de l'Empereur Napoléon Ier.
- Armée russe sous les ordres du tsar Alexandre Ier, des généraux Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov et Pierre Wittgenstein, et de l'amiral Pavel Vasilievich Chichagov (ou Tchichagov).
Pertes
- Grande Armée : de 30 à 45 000 hommes (dont la plupart n'ont pas été directement victimes des combats ou même n'y ont pas pris part).
- Armée russe : plus de 10 000 hommes.
Mystifiés par les manoeuvres de Napoléon, les Russes engagent la bataille de la Bérézina alors même que l'essentiel de l'armée française a déjà franchi le cours d'eau et s'est dégagé de la souricière dans laquelle l'ennemi a bien cru l'enfermer. Malgré sa victoire, la Grande Armée laisse derrière elle des dizaines de milliers de traînards épuisés et démoralisés qui ont trop tardé à traverser.
La situation générale
L'armée de Napoléon Ier, en retraite après la désastreuse Campagne de Russie, voit le 23 novembre 1812 sa route bloquée par la Bérézina [Бярэзіна], une rivière marécageuse. Les troupes russes comptent acculer les Français sur cet obstacle, et les anéantir.
Le salut passe par la très rapide construction de deux ponts face au village de Studianka [Студзёнка] [54.32604, 28.35336], 15 kilomètres en amont de la ville de Borissov [Барысаў] [54.245223, 28.50443], par les pontonniers du général Jean-Baptiste Éblé, dont la plupart succombent à ce travail dans l'eau glacée.
La Grande Armée franchit la Bérézina à partir du 26 en début d'après-midi, malgré l'opposition des trois armées russes commandées respectivement par:
- Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov (Михаил Илларионович Голенищев-Кутузов)
- Pierre de Sayn-Wittgenstein (Пётр Христиа́нович Ви́тгенштейн)
- Pavel Vasilievich Chichagov (Па́вел Васи́льевич Чича́гов)
La bataille
Les Russes attaquent le 28, mais se voient opposer une résistance farouche, en particulier des hommes du maréchal Victor, duc de Bellune et des cavaliers du général François Louis Fournier-Sarlovèze .
La nuit voit traverser plusieurs milliers d'hommes, mais Eblé doit détruire les ponts le 29 au matin, pour protéger la retraite, alors que de nombreux retardataires restent encore sur la rive gauche.
Conséquences
Le franchissement de la Bérézina par les Français est un incontestable succès militaire, mais le nom de cette rivière est devenu en France synonyme de déroute, voire de désastre, en raison de l'importance des pertes subies : de l'ordre de quarante-cinq mille morts ou prisonniers.
Carte de la bataille de la Bérézina
Tableau - "Przejscie wojsk Napoleona przez Berezyne - Napoléon traversant la Bérézina". Peint en 1866 par January Suchodolski.
Témoignages
Molodetschino, le 3 décembre 1812.
[...] Le général Dombrowski défendit la tête de pont de Borisow avec trois mille hommes. Le 23, il fut forcé, et obligé d'évacuer cette position. L'ennemi passa alors la Bérésina, marchant sur Bobr ; la division Lambert faisait l'avant-garde. Le deuxième corps, commandé par le duc de Reggio, qui était à Tscherein, avait reçu l'ordre de se porter sur Borisow pour assurer à l'armée le passage de la Bérésina. Le 24, le duc de Reggio rencontra la division Lambert à quatre lieues de Borisow, l'attaqua, la battit, lui fit deux mille prisonniers, lui prit six pièces de canon, cinq cents voitures de bagages de l'armée de Volhynie, et rejeta l'ennemi sur la rive droite de la Bérésina. Le générai Berkeim, avec le quatrième de cuirassiers, se distingua par une belle charge. L'ennemi ne trouva son salut qu'on brûlant le pont, qui a plus de trois cents toises.
Cependant l'ennemi occupait tous les passages de la Bérésina ; cette rivière est large de quarante toises ; elle charriait assez de glaces ; mais ses bords sont couverts de marais de trois cents toises de long, ce qui la rend un obstacle difficile à franchir.
Le général ennemi avait placé ses quatre divisions dans différents débouchés où il présumait que l'armée française voudrait passer.
Le 26, à la pointe du jour, l'empereur, après avoir trompé l'ennemi par divers mouvements faits dans la journée du 25, se porta sur le village de Studzianca, et fit aussitôt, malgré une division ennemie, et en sa présence, jeter deux ponts sur la rivière. Le duc de Reggio passa, attaqua l'ennemi, et le mena battant deux heures ; l'ennemi se retira sur la tête de pont de Borisow. Le général Legrand, officier du premier mérite, fut blessé grièvement, mais non dangereusement. Toute la journée du 26 et du 27 l'armée passa.
Le duc de Bellune, commandant le neuvième corps, avait reçu ordre de suivre le mouvement du duc de Reggio, de faire l'arrière-garde, et de contenir l'armée russe de la Dwina qui le suivait. La division Partouneaux faisait l'arrière-garde de ce corps. Le 27 à midi, le duc de Bellune arriva avec deux divisions au pont de Studzianca.
La division Partouneaux partit à la nuit de Borisow. Une brigade de cette division qui formait l'arrière-garde, et qui était chargée de brûler les ponts, partit à sept heures du soir ; elle arriva entre dix et onze heures ; elle chercha sa première brigade et son général de division qui étaient partis deux heures avant, et qu'elle n'avait pas rencontrés en route. Ses recherches furent vaines ; on conçut alors des inquiétudes. Tout ce qu'on a pu connaître depuis, c'est que cette première brigade, partie à cinq heures, s'est égarée à six, a pris à droite au lieu de prendre à gauche, et a fait deux ou trois lieues dans cette direction ; que dans la nuit, et transie de froid, elle s'est ralliée aux feux de l'ennemi, qu'elle a pris pour ceux de l'armée française ; entourée ainsi, elle aura été enlevée. Cette cruelle méprise doit nous avoir fait perdre deux mille hommes d'infanterie, trois cents chevaux et trois pièces d'artillerie. Des bruits couraient que le général de division n'était pas avec sa colonne, et avait marché isolément.
Toute l'armée ayant passé le 28 au matin, le duc de Bellune gardait la tête de pont sur la rive gauche ; le duc de Reggio, et derrière lui toute l'armée, était sur la rive droite.
Borisow ayant été évacué, les armées de la Dwina et de Volhynie communiquèrent ; elles concertèrent une attaque. Le 28, à la pointe du jour, le duc de Reggio fit prévenir l'empereur qu'il était attaqué ; une demi-heure après, le duc de Bellune le fut sur la rive gauche ; l'armée prit les armes. Le duc d'Elchingen se porta à la suite du duc de Reggio, et le duc de Trévise derrière le duc d'Elchingen. Le combat devint vif ; l'ennemi voulut déborder notre droite ; le général Doumerc, commandant la cinquième division de cuirassiers, et qui faisait partie du deuxième corps resté sur la Dwina, ordonna une charge de cavalerie aux quatrième et cinquième régiments de cuirassiers, au moment où la légion de la Vistule s'engageait dans les bois pour percer le centre de l'ennemi, qui fut culbuté et mis en déroute. Ces braves cuirassiers enfoncèrent successivement six carrés d'infanterie, et mirent en déroute la cavalerie ennemie qui venait au secours de son infanterie: six mille prisonniers, deux drapeaux et six pièces de canon tombèrent en notre pouvoir.
De son côté, le duc de Bellune fit charger vigoureusement l'ennemi, le battit, lui fit cinq à six cents prisonniers, et le tint hors la portée du canon du pont. Le général Fournier fit une belle charge de cavalerie.
Dans le combat de la Bérésina, l'armée de Volhynie a beaucoup souffert. Le duc de Reggio a été blessé ; sa blessure n'est pas dangereuse ; c'est une balle qu'il a reçue dans le côté.
Le lendemain 29, nous restâmes sur le champ de bataille. [...]
Calendrier
Toutes les dates sur cette page sont dans le calendrier grégorien (alors en avance de douze jours sur le calendrier julien en usage en Russie à cette époque).Crédit photos
Photos par Lionel A. Bouchon.Photos par Marie-Albe Grau.
Photos par Floriane Grau.
Photos par Michèle Grau-Ghelardi.
Photos par Didier Grau.
Photos par des personnes extérieures à l'association Napoléon & Empire.